lundi 26 mai 2008

Présentation générale

Indexicalité, Perception : de l'Usage du langage à la Connaissance du monde

Quatre journées d’étude organisées au cours de l’année universitaire 2008-2009 au sein de l’équipe EXeCO (Université Paris 1, EA Philosophies Contemporaines) par Valérie Aucouturier, Charlotte Gauvry, Perrine Marthelot, Marc Pavlopoulos et Sabine Plaud

La philosophie, loin de l’image d’une réflexion purement spéculative et désincarnée, est le lieu d’une réflexion féconde sur le monde environnant. Le questionnement philosophique porte sur les conditions de possibilité des modes d’accès perceptifs au monde, sur la nature de la perception et des sensations, mais également sur la structuration du monde selon un usage, et sur le sens qui émane de l’inscription dans une situation ou un contexte. Depuis le monde et à propos du monde, la philosophie croise alors les approches problématiques. De celles, proprement scientifiques, de la physique et de la psychologie jusqu’à l’ancrage pragmatique, toutes les approches convergent sur une interrogation fondamentale: celle du lien qui unit le sujet percevant et agissant au monde qui l’entoure.

Cette question de l’ancrage perceptif et pratique dans le monde ouvre alors sur une seconde question fondamentale: celle des réseaux de sens qui émanent de l’usage du monde même et qui traversent la signification linguistique. Il s’agit alors d’approfondir la réflexion portant sur le monde et de l’ouvrir à la réflexion sur les rapports entre perception, usage et sens. Comment le sens est-il lui-même dépendant d’un usage particulier du monde? Comment le langage ne fait-il sens que depuis le monde dans lequel il s’inscrit, dans une situation particulière? Le problème est alors double: il s’agit d’une part d’analyser la place et les conditions de possibilité de l’inscription du sujet percevant, pensant et agissant dans le monde d’une part, et d’interroger la dépendance du monde et du sens d’autre part.

Dès lors, deux réflexions se croisent, et tissent ensemble une problématique complexe: si le langage ne fait sens que depuis son immersion dans le monde, c’est par un certain usage, par son insertion dans une situation ou un contexte. Et si le monde constitue un contexte, et offre la surface de fond sur laquelle construire un usage, il est alors signifiant, il offre sa surface au sens. Cette interdépendance du questionnement sur la constitution du sens dans l’usage du monde constitue le fil conducteur de ces journées d’étude.

Les quatre journées d’étude organisées en 2008-2009 au sein de l’équipe EXeCO interrogeront chacune un aspect particulier de ce problème général, dans le cadre d’une réflexion sur la philosophie du monde germanique moderne (19e 20e siècles). La première journée portera sur le problème de l’indexicalité, ouvrant la réflexion sur la nécessité de l’inscription du langage dans une situation. La seconde journée interrogera la notion d’usage chez Heidegger et Wittgenstein, afin de déterminer sous quelles conditions le sens peut être construit par l’usage. La troisième journée analysera l’œuvre de l’une des grandes figures de la science allemande, Hermann von Helmholtz, dont on abordera les réflexions en matière de théorie de la connaissance et de la perception. La quatrième journée abordera l’œuvre de la philosophe G.E.M. Anscombe.

dimanche 25 mai 2008

Samedi 8 Novembre 2008. Indexicalité.

L’Indexicalité
Au croisement du langage et de la perception: la deixis

Organisation : Perrine MARTHELOT

Le problème de l’indexicalité, s’il peut tout d’abord paraître un point de détail technique de philosophie du langage, permet cependant d’interroger sous un angle fécond le problème de l’inscription du langage dans le monde de la perception. Le problème que nous aimerions soulever lors de cette journée n’est alors pas celui, classique, de savoir en quoi le langage peut renvoyer au monde, mais en quoi, et dans quelles limites, le monde est-il nécessaire pour qu’il y ait quelque chose comme un langage. S’il faut considérer qu’il n’est possible de parler que depuis l’origine de son inscription dans le monde, le problème de l’indexicalité conduit alors à poser la question suivante: l’indexicalité ne concerne-t-elle qu’une partie, très restreinte et spécifique de nos énoncés doués de sens, ou notre langage est-il en fait très largement indexical dans son fonctionnement? L’enjeu est alors de tester les limites et la validité de ce concept élargi d’indexicalité, et d’analyser les rapports qu’entretiennent le langage et le monde dans ce cadre élargi.

Karl Bühler a développé, dans sa Théorie du langage l’hypothèse d’un double système de champs du langage: champ déictique et champ symbolique. L’étude de l’indexicalité conduit dans cette œuvre à l’examen du champ déictique, ou situation. Il s’agira alors d’interroger les différents modes de deixis (deixis ad oculus, anaphore, deixis ad phantasma), la particularité de l’ancrage ici-je-maintenant dans une situation, d’évaluer les enjeux posés par la reprise du concept de champ, et de faire dialoguer cette œuvre avec les problématiques contemporaines concernant l’indexicalité.

samedi 24 mai 2008

Samedi 17 Janvier 2009. Usage.

L’usage chez Heidegger et Wittgenstein

Organisation : Charlotte GAUVRY

Lieu : Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - 17, rue de la Sorbonne. 75005. Escalier C, 1er étage -Salle Lalande

Programme :

Matinée :
9h00 : Remarques introductives

9h15 : Vincent GRONDIN (Université de Montréal - Université Paris 1 - EXeCO) Wittgenstein et la "préhistoire du sens"

10h15 : Jean-Claude MONOD (CNRS – Archives Husserl) Un « pragmatisme ambigu » ? L’' « en tant que » herméneutique au regard des Recherches philosophiques.

11h15 : Pause café

11h30 : Françoise DASTUR (Université de Nice Sophia-Antipolis – Archives Husserl) Langage et métaphysique chez Wittgenstein et Heidegger

12h30 : Pause déjeuner

*
Après-midi :
14h : Raphaël EHRSAM (Université Paris 1 - EXeCO) "La philosophie ne doit en aucune manière porter atteinte à l'usage effectif du langage" (RP, § 124): Wittgenstein et les enjeux de la description.

15h : Jean-Philippe NARBOUX (Université Bordeaux 3) La logique au crible de l'usage : quotidienneté et primitivité chez Heidegger et Wittgenstein

16h : Pause café

16h15 : Charlotte GAUVRY (Université Paris 1 – EXeCO). L'usage recouvre t-il le contexte chez Heidegger et Wittgenstein ? Usage et échec

17h15 : Jocelyn BENOIST (Université Paris 1 - Archives Husserl.) L'usager des signes

18h15 : Clôture de la journée


Argument :

Le XXe siècle philosophique se distingue par un intérêt accru pour les pratiques et les usages du monde. Nous entendons alors interroger la notion centrale d’ « usage » par une confrontation entre l’acception heideggérienne de la notion - telle qu’elle est travaillée jusqu’à Sein und Zeit - et celle de la pragmatique de Wittgenstein.

Du Tractatus logico-philosophicus aux Philosophische Untersuchungen, Wittgenstein défend avec constance la thèse pragmatique que tout acte de langage est tributaire de la manière dont on en use. L’ « usage », inscrit dans le monde, est l’instance ultime de la détermination du sens et de son contexte. C’est cette prévalence que l’on pourra analyser et interroger.

Un recours prudent aux analyses phénoménologiques du premier Heidegger s’avère alors fécond. Sein und Zeit témoigne certes du rôle déterminant de l’ « usage » dans la constitution des contextes et du sens. L’œuvre s’affirme comme une analytique de la quotidienneté ancrée dans le monde. Cet ancrage est bien plus pragmatique que spatial : l’ « in-der-Welt-sein » est une pratique du monde, son commerce (« Umgang »). Le sens lui-même est construit par l’ « usage » : loin d’être référentiel, il est travaillé par ses structures de renvoi. Pour autant, restent de cruciales divergences avec l’acception wittgensteinienne. Cet « usage » heideggérien est d’emblée posé comme catégorial et comme déterminé par et pour le Dasein. Dès le §9, la catégorie de la Zuhandenheit : de l’ « être-à-portée-de-la-main » le recouvre. Un tel « usage » est formel et, en un sens, transcendantal. La divergence avec l’acception wittgensteinienne est ici irréductible. Elle est à travailler.

La confrontation de la pensée de Wittgenstein aux cours antérieurs à Sein und Zeit, antérieurs à la conception de la figure du Dasein, s’avère alors pertinente. L’analyse de la facticité des premiers cours de 1919-25, marquée par l’herméneutique de Dilthey et par la philosophie bergsonienne de la vie, présente l’avantage certain d’interroger les éventuelles déterminations de la notion d’ « usage » sans recourir au postulat d’une détermination apriori ou conventionnelle. On analysera alors ces premiers cours : la refonte du concept husserlien d’intentionnalité sous le couple conceptuel « Bezugssinn/ Vollzugssinn », la reformulation de la notion de « contexte » par la triade « Umwelt/ Mitwelt/ Selbstwelt » pour interroger la notion wittgensteinienne d’ « usage » et ses potentielles limitations, par le réel, par la vie ou par la nature.

vendredi 23 mai 2008

Samedi 7 février 2009. Hermann von Helmholtz.

Hermann von Helmholtz :
Théoricien de la perception, philosophe de l’esprit


Samedi 7 février 2009

Organisation : Sabine PLAUD

Lieu : Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne – UFR de philosophie, 17, rue de la Sorbonne. 75005 Paris, Escalier C, 1er étage, Salle Lalande

Programme:

9h : Ouverture de la matinée – Présidence : Sabine Plaud (Université Paris 1 - EXeCO)
9 h15 : Edwin Glassner (Wiener Kreis Institut, Vienne) : « Benno Erdmann's formal empiricism and the resolution of the tension between Helmholtz's causal theory of perception and his psychophysical parallelism »

10h : Matthias Neuber (Université de Tübingen) : « Helmholtz's theory of space perception and its influence on Schlick »
10h45: Pause

11h : Antonia Soulez (Université Paris 8) : « Helmholtz et l’idée d’un système naturel de la musique »

11h45 : Frédéric Pascal (EHESS – Institut Jean Nicod): « La relation entre le monde physique, la sensation et la discrimination perceptive sur le domaine de l'acoustique et de l'audition »

12h30-14h : Pause déjeuner

14h : Ouverture de l’après-midi – Présidence : Guillaume Garreta (Université Paris 1, EXeCO, CIPh)

14h : David J. Hyder (Université d’Ottawa) : « What does the transcendental argument of Helmholtz's first two papers on geometry prove? »

14h45 : Christophe Bouriau et Gerhard Heinzmann (Archives Poincaré, Nancy) : « Perception et inférences inconscientes : le mythe de l'immédiateté perceptive »

15h30 : Pause

15h45 : Michael Heidelberger (Université de Tübingen) : « Helmholtz criticized : Hering, Mach, Riehl, James »

16h30 : Jean-Marie Chevalier (Université Paris-XII, Institut Jean Nicod) : « Un éclairage peircien sur la chromatique de Helmholtz »

17h15 : Sabine Plaud (Université Paris 1 – ExeCO) : « Des faits dans la perception aux faits dans la proposition : L’articulation entre signe et image chez Helmholtz et Wittgenstein »


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Argument:

Hermann von Helmholtz (1821-1894) appartient à la dernière génération de savants-philosophes au champ de compétence presque universel, et il demeure l’une des figures les plus marquantes de la science allemande du XIX° siècle. Physicien, il est l’auteur d’importants travaux relatifs à la théorie de la conservation de l’énergie et aux principes de la mécanique. Psychologue, il a fourni des contributions décisives à la compréhension de l’interaction entre processus physiologiques et processus psychologiques : sa pensée peut ici être mise en perspective avec celle de Fechner dans le cadre de la fondation d’une science psychophysique. Cette corrélation du physique et du psychologique est tout particulièrement développée dans les travaux de Helmholtz en matière de physiologie de la perception, qu’il s’agisse du domaine optique ou acoustique. Son monumental Manuel d’optique physiologique articule ainsi les deux dimensions physiologique et psychologique de la vision en distinguant entre impressions, sensations et perceptions visuelles. De même, il n’est pas exagéré de présenter sa Théorie physiologique de la musique comme un ouvrage révolutionnaire, non seulement de par la compréhension qu’il nous fournit du phénomène des harmoniques, mais encore de par la théorie générale de la perception qui s’en dégage.

Un objectif de cette journée d’études sera d’explorer ces différents aspects de la pensée de Helmholtz. Au-delà de ses contributions scientifiques spécifiques, on pourra étudier la théorie générale de la connaissance qui s’exprime à travers ses travaux, en examinant par exemple sa théorie sémiotique de la perception, sa reprise de la pensée kantienne ou encore sa théorie des inférences inconscientes. On pourra également approfondir l’influence décisive qu’a pu exercer Helmholtz sur certains penseurs modernes, notamment sur Heinrich Hertz, qui fut son assistant et l’un de ses principaux disciples. Enfin, on pourra revenir sur certaines applications de cette pensée dans des domaines parfois inattendus, notamment en esthétique, où sa théorie physiologique de l’harmonie a pu servir de norme pour la composition musicale.

jeudi 22 mai 2008

Samedi 16 mai 2009. Elizabeth Anscombe.

Elisabeth Anscombe et la philosophie contemporaine - Journée EXeCO-ENS, Département de philosophie - Samedi 16 mai 2009


Organisation : Valérie AUCOUTURIER et Marc PAVLOPOULOS

Élève, exécutrice testamentaire et grande commentatrice de Wittgenstein, férue de philosophie ancienne en général et d’Aristote en particulier, thomiste et catholique militante, professeur de Cora Diamond et collègue aînée de Philippa Foot, initiatrice peut-être malgré elle de l’éthique dite des vertus et de la philosophie de l’action contemporaine, Anscombe fut assurément une des personnalités philosophiques les plus fortes, diverses et controversées du 20ème siècle. En défendant la primauté des relations causales singulières sur les régularités nomiques dès 1971, la non-référence de " je ", ou encore l’idée qu’une connaissance authentique peut viser à accorder le monde à l’esprit et non l’inverse, Anscombe cherche toujours à se situer au cœur de la philosophie analytique de son temps pour aller à contre-courant de certains de ses dogmes empiristes et idéalistes inaperçus.

Plus encore que la variété des époques et des domaines philosophiques dont elle a traité, c’est cette attention opiniâtre et sans concession aux questions qui marquait ses élèves et aujourd’hui ses lecteurs. Anscombe est une philosophe à la mode analytique et pourtant aussi dans le sens ancien du terme, au sens des questions platoniciennes qu’elle ne cesse, comme le Socrate des dialogues, de remettre sur le métier par des exemples simples, triviaux, apparemment inoffensifs et souvent dévastateurs. C’est aussi une remarquable lectrice, capable de décliner sur une même question Aristote et Wittgenstein, Brentano et Descartes ou encore Austin et les médiévaux tout en prenant toujours soin de bien préciser les failles qui séparent les modernes des anciens. En bref, une des rares figures contemporaines qui permettent peut-être de croire en l’unité de la philosophie.

En envisageant plusieurs facettes de cette pensée extraordinairement dense, la journée se propose de mieux comprendre cet auteur de plus en plus citée mais pas toujours bien connue et de montrer la pertinence de ses thèses pour de nombreux débats et questionnements actuels.


PROGRAMME

Matinée : Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne - 12, Place du Panthéon, salle 216

9h00-9h15 Présentation de la journée par Valérie Aucouturier (Paris 1) et Marc Pavlopoulos (ENS)

9h15-10h00 Bruno Gnassounou (Université de Nantes) : " Proposition et connexion non prédicative "

10h00-10h45 Marc Pavlopoulos (ENS) : " Connaissance sans observation, connaissance pratique et connaissance de soi : quelques remarques grammaticales "

10h45-11h00 Pause

11h00-12h45 : la première personne

11h00-11h30 Rachel Wiseman (Université d’York) : " Anscombe and McDowell on intentions and I "

11h30-12h15 Vincent Descombes (EHESS) : " La référence à soi "

12h15-12h45 Table ronde avec Vincent Descombes, Bruno Gnassounou et Rachel Wiseman.

12h45-14h15 Déjeuner

Après-midi : École normale supérieure - 45, rue d’Ulm, salle Cavaillès

14h15-15h00 Valérie Aucouturier (Paris-1 et Université de Kent) : " L’expression des intentions "

15h00-15h45 Philippe de Lara (Université Paris 2) : " Que prouve l’argument des stopping modals ? "

15h45-16h00 : pause

16h00-16h45 Roger Teichmann (Université d’Oxford, St Hilda’s College) : " Is Pleasure a Good ? "

16h45-17h30 Cyrille Michon (Université de Nantes) : " Libre arbitre et responsabilité morale "

17h30-18h00 Table ronde avec Vincent Descombes, Cyrille Michon et Roger Teichmann : Anscombe et la philosophie morale.

Contact :

valerie.aucouturier@malix.univ-paris1.fr ; marc.pavlopoulos@ens.fr